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EN OTAGE

1ère partie.

Ch.1. Prise d’otages

Je sais bien que je ne suis pas capable de raconter mon histoire, mais laissez-moi au moins vous expliquer le début. Ensuite, si le récit devient trop compliqué, quelqu’un qui écrit mieux que moi continuera.
C’est tellement excitant que je ne peux pas m’empêcher d’en parler. Seulement, quand je m’excite, je m’embrouille. Oh ! je demanderai à Madou de corriger mes fautes et de rendre tout ça plus clair.
J’habite Lucène, une agréable ville de la Seine-et-Marne, bordée d’un côté par des champs de blé et traversée par un canal dont j’aime bien les eaux verdies. Je m’appelle Laurent Baudrimont, j’ai neuf ans, et ma sœur Nadège a dix-sept ans. Le mercredi, je le passe chez une amie de mes parents. Elle s’appelle Madeleine, mais tout le monde l’appelle Madou. Moi je préfère ça. Mon père est content que je m’entende bien avec elle. Si vous la connaissiez, vous comprendriez pourquoi. C’est simple, moi qui suis « soupe au lait », je lui obéis avec plaisir.
Ce mercredi après-midi, Madou devait aller à sa banque, le Crédit National Agricole, pour retirer du « liquide ». Je n’ai pas compris ce qu’elle voulait dire. Derrière les guichets, il y a des coffre-forts et des ordinateurs, pas des robinets. Enfin, passons. Elle avait aussi emporté sa Bible, parce que, en sortant du C.N.A, elle voulait visiter une amie malade. Parfois, nous y restons longtemps, mais je ne m’ennuie pas, parce que le mari de la dame malade m’emmène au « champ des poneys ». Avec lui, je fais du poney pendant des heures. Le mien s’appelle Nénuphar. C’est chouette.
Donc, nous étions arrivés à la banque. Je me tenais tranquille près du guichet quand je me suis rendu compte que quelque chose d’inhabituel se passait. Un grand calme régnait dans la petite agence. C’était le calme de la peur ! Je les ai vus là, tous les trois, ils étaient masqués et effrayants, leurs revolvers braqués sur les clients et sur la caissière qui vidait le coffre-fort à une vitesse de Tour de France. Ils ne parlaient pas beaucoup, mais, ils ne riaient pas non plus. Alors, j’ai eu peur. Je me suis serré contre Madou. C’était un hold-up ! Un vrai !
Et puis, les choses se sont passées très vite… En repartant, ils ont hurlé des menaces et ils nous ont poussés brutalement, Madou et moi, dans une camionnette qui stationnait à quelques mètres. Avant de quitter la banque, le plus costaud des trois a appuyé son arme contre la tempe de Madou, et il a prévenu tout le monde : « Pas un geste, où je descends la vieille ! » J’avais une horrible peur, mais quand même, ça ne m’a pas plu qu’on appelle ma gentille Madou, la vieille ! Je ne lui vois pas de cheveux blancs.
De l’autre côté de la rue, juste en face de la banque, il y a un hôtel-restaurant. Il paraît qu’à l’intérieur des jeunes bavardaient au bar. A la terrasse, deux hommes, sans doute des retraités, buvaient un café. Ont-ils eu le temps de remarquer notre enlèvement ? Ça m’étonnerait.
Il me semble que nous avons dû rouler pendant une heure environ. Les fenêtres de la camionnette étaient garnies de rideaux marron, mais l’une d’entre elles était entrebâillée. Au début de notre voyage ils ont enlevé leurs masques et le costaud a dit au plus jeune : « Attache les mains de la vieille et du gamin ! » Quand le plus jeune s’est approché de Madou, avec deux solides bouts de corde, elle lui a dit :
– Attends petit, comment t’appelles-tu ?
– Jo
– Quel âge as-tu ?
– Vingt ans.
Effarés, muets, mais prêts à bondir, les deux autres observaient la scène.
– Jo, tu as le même âge que ma petite fille, je pourrais être ta grand-mère. Est-ce que tu attacherais les mains de ta grand-mère ?
Jo a eu un mouvement de recul et il a glissé un regard décontenancé vers les deux autres. Madou a continué:
– Nous sommes inoffensifs, le petit et moi, pourquoi voulez-vous nous attacher ? Les gens armés et dangereux, c’est plutôt vous ! Ce n’est pas nous !
Ledit Jo s’est tourné vers le costaud et a demandé :
– Chef, qu’est-ce qu’on fait ?
Le Chef a hoché la tête comme s’il essayait de déchiffrer des choses cachées ou mystérieuses dans les paroles de Madou. Il nous a fusillés du regard mais il est resté muet.
Madou a profité de ces quelques secondes d’hésitation, où leurs idées semblaient toutes chavirées pour proposer :
– Je m’appelle Madou. Puisque nous sommes appelés à vivre ensemble, dites-moi au moins vos prénoms ? Précipitamment, Jo a répondu :
– Lui, c’est Marcel. Le chef, c’est Bernard.
Alors, le Bernard a fait retomber sa colère sur celui qui avait osé répondre.
– Toi ! ferme-là ! C’est moi qui commande ici !
– Bernard, calme-toi, c’est plus sympathique de se connaître, non ? fit Madou sans se démonter.
C’était bizarre. Notre sort était dramatique, mais il semblait que Madou tenait la situation en main. Je savais pourquoi elle n’avait pas peur. Le Seigneur Jésus était avec elle – Je veux dire, avec nous.
Je crois que l’attitude de Madou leur apportait un souci sur lequel ils ne comptaient pas. J’avais l’impression que quelque chose était coincé dans leurs têtes. Les manières et les propos de cette petite dame-là étaient déroutants.
– Vous nous avez kidnappés, d’accord, insista Madou, et après ? Savez-vous, mes garçons que je préfère être à ma place qu’à la vôtre ?
Marcel décida de prendre la parole, tandis que Bernard médusé, révolver au poing, nous observait tous.

2ème partie.

– Dis donc, la vieille ! je veux dire, la mamie, est-ce que tu essaierais de nous embobiner avec ton bagout ?
– Pas le moins du monde.
– Mais enfin, tu ne peux pas tomber dans les pommes, faire une crise de nerfs ou demander grâce, comme tout le monde !
– Je ne demande grâce qu’à une seule personne, c’est à mon Dieu. Je sens que je vais le faire pour vous trois, vous en avez grand besoin.
Le chef s’approcha de mon amie, menaçant. Je croyais qu’il allait l’assommer avec la crosse de son arme, parce que son visage était rendu laid par une mauvaise grimace de méchanceté. Mais, à mon grand soulagement, il se contenta de bougonner :
– Laissez-la tranquille ! Faut pas la contrarier !
Je remarquai que Jo avait profité de la discussion pour se débarrasser de ses bouts de corde. Moi, la peur m’avait rendu tout moite.
Il s’écoula encore une dizaine de minutes pendant lesquelles le danger de notre situation m’apparut. Alors, tout à coup, ma frayeur augmenta lorsque je réfléchis au fait qu’ils n’étaient plus masqués. Je me dis : « Sûr, ils vont nous tuer maintenant que nous avons vu leurs visages… » Je voulais le dire à mon amie. Elle dut comprendre mon angoisse, car elle murmura :
« Dieu est notre refuge et notre force, un secours dans les détresses, toujours facile à trouver » (Ps. 46. 1). Elle savait que je comprendrais, elle m’avait fait apprendre ce verset une semaine avant.
Au fur et à mesure que nous avancions, je devinais que nous roulions en pleine campagne : plus d’arrêts aux feux rouges, de nombreux tournants. Il fallait se cramponner, une bonne odeur de terre mouillée, parce qu’il avait plu quelques heures auparavant.
Après un dernier virage et un brusque crissement de pneus sur le gravier, la voiture stoppa. On nous fit sortir vivement du véhicule, mais avec moins de brutalité qu’à Lucène, au moment du hold-up. Marcel et Bernard, toujours armés et chargés de leur butin ordonnèrent à Jo d’ouvrir la porte d’une assez belle maison. Il fouilla dans ses poches et les deux autres commencèrent à s’énerver parce qu’il ne trouvait pas ses clefs. Il ne serait pas convenable de répéter les grossièretés dont ils l’accablèrent.
La camionnette disparut sans que nous n’ayons jamais vu le visage du conducteur. Madou fixa la voiture aussi longtemps qu’elle le put. Est-ce qu’elle voulait relever le numéro ? Oh ! ça ne m’étonnerait pas, maligne comme elle est…
Jo cessa de fouiller dans ses poches, parce que de l’intérieur quelqu’un nous ouvrit. C’était une grosse femme aux cheveux très noirs, teints, et qui donnaient l’impression d’être brûlés. Sans doute c’était la teinture. Elle fumait une cigarette. Elle me sembla aussi vulgaire que Madou paraissait fine et distinguée.
– Qu’est-ce que vous m’amenez là ? cria-t-elle avec stupeur, en nous désignant tous les deux.
– Des otages, marmonna Marcel. Pas pu faire autrement.
– Y manquait plus que ça ! Vous êtes fous ! non, mais vous êtes fous !
– Tais-toi ! C’est pas ton problème, répondit Marcel, sur un ton qui n’admettait pas de réplique. Ton boulot, c’est de les surveiller. Tu vas leur donner la chambre d’amis.
– Et quoi encore ? La plus belle !
Alors, j’entendis la petite voix flûtée de Madou demander :
– Avec salle de bains et toilettes attenantes, je suppose… Et Madame, puisque vous avez la gentillesse de nous accueillir comme clients de passage, j’espère que vous êtes bonne cuisinière.
La femme faillit tomber à la renverse et faire une crise de je ne sais quoi (ça doit avoir un nom que les docteurs connaissent).
Son visage devint d’un rouge si sombre qu’il était presque violet. Et puis, quand elle retrouva la parole, ce fut une telle quantité de jurons, que là non plus, je ne peux pas les écrire. Je suis sûr que ma monitrice de la classe biblique n’en a jamais entendu autant de toute sa vie. Moi non plus, d’ailleurs. Il y en a même que mes copains ne connaissent pas. Moi, je sais que je dois demander au Seigneur de me les faire oublier pour toujours. J’entendis Madou murmurer, comme si elle se parlait à elle-même : « Cette femme sent l’alcool ; assurément, elle doit boire ».
Quand nous nous sommes retrouvés tous les deux dans la belle chambre d’une maison de campagne, d’habitude c’est pas comme ça dans les histoires, on met les otages dans une pièce sale aux volets fermés, j’ai éclaté en sanglots.
Si je vous ai raconté tous ces événements, c’était pour vous tenir au courant, mais je ne suis qu’un garçon de neuf ans, et j’ai peur. Même si le Seigneur Jésus a changé ma vie, je ne me sens pas très brave. Madou m’a pris dans ses bras et elle m’a bercé avec des mots d’affection. Entre deux sanglots, je lui ai demandé :
– Madou, tu ne sembles pas inquiète, pourquoi ?
– Écoute-moi, Laurent ! Je ne suis pas plus courageuse qu’une autre personne, mais le Seigneur m’a vraiment enlevé la peur, sans quoi, je ne pourrais pas m’expliquer pourquoi je suis si calme. Il est notre secours, ne l’oublie pas.
– Oh ! j’ai bien vu…
Puis, je me suis remis à pleurer.
– Crois-tu que Papa et Maman soient au courant ?
– Certainement. Dans une petite ville comme Lucène les choses vont vite. Et de plus, ils en parleront dans les médias dès ce soir.
– Oh ! c’est vrai ? Je n’y avais pas pensé.
– Aussi longtemps qu’ils nous tiennent, la police ne peut rien contre eux. Du moins, je le suppose.
– En tout cas, mes parents doivent être en souci.
– Sans doute, mais eux aussi, ils savent à qui s’adresser.
– Surtout Papa, ses prières, c’est du solide.
Même s’il n’y en a qu’un dans la maison qui prie, c’est très précieux, tu sais.
– Qu’est-ce que tu crois que les bandits vont faire de nous ? Peut-être qu’ils…
– Stop ! lança Madou brièvement. Interdiction d’imaginer quoi que ce soit et de se faire des idées. Nous faisons confiance au Seigneur jusqu’au bout, d’accord ?
J’avais une sorte de boule dans la gorge. La tristesse était là comme une bête avec des griffes et qui me « graffignait » le cœur. Oui, j’avais envie de pleurer, mais je murmurai :
– D’accord Madou.
A ce moment-là, la clef tourna dans la serrure et la grosse femme brune entra… Elle lança sur le lit une poignée de magazines, des B.D. et quelques romans policiers.
Madou remarqua que l’haleine de la femme sentait l’alcool.
– Voilà de quoi vous occuper, dit-elle sur un ton grognon.
Elle allait se retirer, mais mon amie l’interpella :
– Il nous faudrait mieux que cela, Madame. Des crayons de couleur et du papier seraient les bienvenus. En outre, c’est l’heure du goûter pour ce jeune garçon. N’oubliez pas que vous êtes tous responsables de nous, vous devez nous renvoyer en bonne forme dans nos familles.
– Vous renvoyer ! Comment vous savez ça ?
– Un cambriolage, passe encore… mais une prise d’otages, ça va chercher loin. La justice n’est pas tellement aimable avec ce genre de délit.
– On voit bien que vous ne connaissez pas le Bernard. C’est un chef !
– On voit bien que vous ne connaissez pas mon chef à moi ! répliqua Madou.
– Vous… vous avez un chef ! s’exclama la femme ahurie.
De nouveau, son visage changea de couleur. Cette fois-ci, ce ne fut pas du violet, mais sa peau devint d’un blanc gris, un peu comme mes cahiers de brouillon.
Madou ajouta :
– Il tient notre situation en main. Vous ne nous ferez sortir d’ici que quand II l’aura décidé.
– Ben alors !
Elle trembla et se retira sans rien ajouter d’autre.
« Je me demande ce qu’elle leur raconte maintenant », soupira Madou.
Je crois qu’elle avait envie de rire, mais ce n’était pas le moment.
Je lui demandai :
Quand tu as parlé de notre chef, tu voulais parler du Seigneur Jésus ?
– Naturellement.
Un détail me surprenait : nous aurions dû être pétrifiés de peur tous les deux, et c’était les kidnappeurs que Madou rendait inquiets. De plus, dans ses réponses hardies, il n’y avait jamais de mensonges. Oui, vraiment, le Seigneur Jésus lui donnait de bonnes idées.
La femme revint une demi-heure plus tard avec un goûter, des feutres et du papier. Elle resta muette et se contenta d’observer Madou quelques secondes, puis elle repartit.

C’était un splendide après-midi du premier jour de Juillet. Dans quarante-huit heures ce serait la fin de l’année scolaire. De ma fenêtre je vis un gros bourdon butiner de beaux pois de senteur. Lui au moins, il était libre. Il voletait d’une fleur à l’autre tandis que moi j’étais enfermé.
Les pois de senteur me rappelèrent le « champ des poneys », puis je pensai à ma grande sœur Nadège. Quand j’avais quatre ans, c’était elle qui m’avait appris à monter à cheval. Oh, il ne fallait pas laisser les idées tristes se glisser en moi. Non, il ne le fallait pas. Après tout, j’aurais pu être seul dans le noir, et ligoté. Au lieu de cela, j’étais en compagnie d’une amie formidable et rassurante.
Madou fit un tri dans les livres qu’on nous avait donnés. Elle les mit tous de côté, sauf une B.D. dont les illustrations n’étaient pas trop hideuses et l’histoire vraisemblable.
Les heures me semblaient longues. Très longues.
Madou prit sa Bible et me lut le beau récit de Ruth dans l’Ancien Testament. Elle y ajouta ses propres remarques, cela me rendit l’histoire vivante et actuelle. Madou avait travaillé aux champs dans son adolescence, et elle savait ce que Ruth éprouvait.
Pendant qu’elle me parlait, des hirondelles passèrent dans le ciel avec des sifflements aigus et légers. Je lui demandai :
– Crois-tu qu’il y avait des hirondelles au-dessus du champ où Ruth glanait le blé ?
– Peut-être. Il faudrait connaître quels étaient les oiseaux d’Israël à cette époque. Ce serait intéressant de se renseigner.
Il était sept heures du soir quand on nous apporta le repas sur un plateau. Oui, sur un plateau. Quel luxe ! Mais mon estomac était tout serré et rempli de nœuds. Cependant, Madou m’obligea à manger.
A huit heures, le bruit de la télévision est parvenu jusqu’à nous. Les informations sans doute. Je me demandais si ma petite mère était là, sur l’écran, avec des larmes dans les yeux, faisant un « appel aux ravisseurs ». Plus tard, je songeai : « Pourquoi ne nous relâchent-ils pas ? » Ils avaient cambriolé la banque, donc, ils n’avaient pas besoin de rançon. J’allais le demander à Madou lorsqu’elle proposa:
– Connais-tu le meilleur moyen de chasser nos craintes ? C’est de commencer à louer le Seigneur. Nous allons établir la liste des cantiques que nous connaissons.
Tous les deux, chacun de notre côté, nous avons noté une bonne liste de chants. J’étais étonné d’en savoir autant. Il faudra que je remercie ma monitrice d’avoir insisté pour que je les apprenne. Puis, Madou m’a dit :
– Avant d’aller dormir, nous ferons notre lecture du soir.
Je soupirai :
– Oui, comme à la maison. Papa se glisse dans ma chambre et nous prions ensemble.
D’un commun accord nous nous sommes agenouillés. Elle a ouvert sa Bible et l’a posée devant nous, sur le lit. Elle m’a demandé de choisir un cantique. J’ai proposé « Une nacelle en silence », c’est un de mes préférés. Tandis que nous chantions, il me semblait que mon cœur se réchauffait. Le froid de la peur s’en allait. Ensuite, Madou choisit « Non jamais tout seul ». Elle avait raison, nous n’étions pas seuls.
Encore une fois, la clef tourna dans la serrure. Je fis le geste de me lever. Mais Madou me retint.
– Ne bouge pas, petit, me dit-elle. Ils peuvent bien nous trouver à genoux, il n’y a pas de honte à cela.
Jo entra. Il nous regarda, gêné.
– Vous chantiez ? demanda-t-il.
– Oui, nous chantons, répliqua Madou.
Il aperçut la Bible et devint tout pâle. Madou suivit son regard et dit :
– Tu vois, nous prions notre Dieu. Nous avons Ses promesses. Il a dit : « Je ne te laisserai point et je ne t’abandonnerai point ».
– Il me semble que j’entends mon père, murmura-t-il, entre haut et bas.
Il se retira très vite et sans bruit. Il avait l’air abattu. Nous nous demandions ce qu’il était venu faire.
Nous nous sommes remis à chanter, mais dans les minutes qui suivirent, le chef fit irruption brutalement. Il hurla :
– Terminé, c’est compris ! Je ferme les volets, et tout le monde au lit !
– Doucement… doucement… je n’ai plus vingt ans.
Madou prit son temps, elle s’allongea sur le lit et je fis de même. Je crois qu’elle n’avait plus tellement envie de discuter. D’un geste rageur, le chef ferma les volets.
– Maintenant, tâchez de vous tenir tranquilles !
– Oh ! on peut chanter dans l’obscurité, vous savez. Bonsoir, et bonne nuit à vous trois.
Il claqua la porte avec hargne.
Les émotions de la journée m’avaient épuisé. Je m’endormis pendant que Madou chantait comme une berceuse :
« Quel ami fidèle et tendre Nous avons en Jésus-Christ… »

À suivre !